« La stabilité soigne »

Quelles sont les principales causes de traumatismes chez les enfants et les adolescents??
Malheureusement, les traumatismes sont extrêmement divers. Ils résultent principalement d’expériences de violence interpersonnelle: guerre, torture, peur permanente de mourir ou de voir ses proches mourir. Qu’elle soit psychologique, physique ou sexuelle, la violence la plus grave est celle perpétrée par les personnes qui s’occupent de l’enfant et dont il dépend émotionnellement. Des expériences telles que la fuite, le déracinement, la négligence et, bien sûr, la pauvreté persistante, la faim, les catastrophes naturelles et leurs conséquences peuvent aussi être à l’origine de traumatismes.
A quoi les personnes extérieures, comme la famille, les amis et les autres proches, peuvent-elles reconnaître un traumatisme?
Les symptômes des enfants et adolescents traumatisés varient considérablement d’un individu à l’autre. Les traumatismes peuvent se manifester par des cauchemars récurrents, des affections psychosomatiques et des troubles du sommeil, mais aussi par des difficultés d’apprentissage et de concentration à l’école. Ils peuvent également provoquer une soudaine mise en retrait, une timidité inhabituelle ou des comportements compulsifs. L’accroissement de l’impulsivité peut aussi faire penser à un traumatisme: les enfants traumatisés sont constamment en état d’alerte. Ils réagissent très promptement et ont souvent du mal à se maîtriser. Ces signes peuvent néanmoins avoir d’autres causes ou s’avérer transitoires. S’ils s’additionnent ou durent longtemps, ils peuvent traduire un traumatisme sous-jacent non résolu. Dans le pire des cas, les personnes concernées se retrouvent prises dans un véritable cercle vicieux, car la méfiance permanente complique l’appréciation des situations sociales, et ces difficultés conduisent elles-mêmes à des comportements inappropriés.
Quels effets à long terme peuvent avoir des traumatismes non traités sur les enfants et les adolescents?
Une thérapie n’est pas toujours nécessaire. Un traitement efficace nécessite du réconfort ainsi qu’un entourage stable et fiable. La sévérité des troubles du développement physique et psychologique est proportionnelle à la durée d’exposition du système nerveux de l’enfant au stress, c’est à-dire aux événements traumatisants. Les traumatismes perturbent le développement des capacités sociales, émotionnelles et cognitives de l’enfant, et influencent donc sa personnalité. En l’absence de traitement, les conséquences à long terme sont graves. On peut observer un manque d’estime de soi, des tendances suicidaires, d’autres maladies mentales qui persistent à l’âge adulte et des troubles psychosomatiques, par exemple cardiovasculaires.
Quelles thérapies se sont imposées pour le traitement des traumatismes chez les mineurs? Pourquoi?
On peut mettre en place une psychothérapie psychodynamique imaginative des traumatismes. Ce genre de thérapie fait appel à l’imagination du patient ou de la patiente pour réguler les émotions et reconstruire l’estime de soi. On peut aussi opter pour l’approche Eye Movement and Desensitization and Reprocessing (EMDR), qui implique des mouvements oculaires rythmés sous supervision. Quelle qu’elle soit, la thérapie choisie doit reposer sur une relation fiable et de long terme avec l’enfant. Une telle relation permet de restaurer l’aptitude à faire confiance, de rétablir la confiance en soi et de reconstruire une personnalité stable.

Sandra Rumpel (lic. phil.) est psychothérapeute, chargée de cours et superviseuse de futurs thérapeutes pour enfants et adolescents, notamment à la Haute école des sciences appliquées de Zurich (ZHAW). Elle est spécialisée dans la thérapie des traumatismes et la psychothérapie transculturelle. Elle est co-fondatrice et aujourd’hui codirectrice de l’association family-help et de ses projets thérapeutiques «aacho» menés à Zurich pour les réfugiés (enfants, adolescents et familles).